Dragon Ball Super : Super Hero, le bon vieux combat [Critique]

La saga Dragon Ball accueille un vingt-et-unième long-métrage nostalgique et correctement mis en scène, ruiné par son lifting en images de synthèse.
Détruite par Son Goku durant son enfance, l’armée du Ruban Rouge fait son retour avec des cyborgs plus puissants que Cell. Piccolo remarque leurs activités et embarque Son Gohan dans son combat.
Peut-on vraiment s’étonner de voir la licence Dragon Ball passer par la case du film de super-héros ? Si l’on peut estimer que le manga d’Akira Toriyama, comme toute autre franchise de son temps, se voit forcé d’épouser les standards d’une pop-culture industrialisée, l’on peut aussi reconnaître que l’influence des comic books pèse depuis toujours sur les aventures de Son Goku. Bambin éjecté de sa planète natale par ses parents, recueilli sur Terre par un vieillard qui lui inculque les valeurs humaines, doté de pouvoirs suprêmes qui en font un guerrier plus puissant que la norme, destiné à protéger les habitants de cette planète-refuge : le protagoniste de Toriyama partage avec Superman – emblème ultime des super-héros et du support comics – des points communs qui laissent peu de doute. Dragon Ball Super : Super Hero pourrait, d’une certaine manière, signifier un retour aux sources pour l’auteur qui ici ne se contente plus de parallèles avec l’homme d’acier et drape ses antagonistes – les « super-héros » du titre – d’une belle cape rouge. Pour ce vingt-et-unième opus, il déterre l’armée du Ruban Rouge qui a visiblement repris du poil de la bête après s’être faite dégommée dans les toutes premières pages du manga. Celle-ci n’a pas digéré sa défaite et s’est mise à produire des androïdes plus redoutables que Cell dans l’objectif de conquérir le monde, encore une fois. Ce sont donc des machines fringuées comme les vieux acteurs de télévision nippone qui vont causer du tort à Piccolo et Son Gohan, nos deux protagonistes du jour. Goku et Vegeta, à qui reviennent l’exclusivité des intrigues depuis Dragon Ball Super, ne sont là que pour un caméo. Pas d’excuse foireuse pour justifier leur mise à l’écart, qui sonne comme la meilleure idée du film (puisque libératrice) : eux veillent désormais sur l’univers tout entier et n’ont probablement plus le temps de se coltiner les terriens et leurs savants fous. Ce retour à une échelle réduite est aussi ce qui fait le charme de ce scénario, qui permet à la licence de se réconcilier avec l’esprit cartoonesque, enfantin et léger des débuts, par le biais d’une pseudo-mission d’infiltration tenue sur quatre minutes et demie, et de combats ravivant les souvenirs du bon Dragon Ball. Sans l’ombre d’un doute, Super Hero part avec de nobles intentions.
Si les partis pris nostalgiques font aller les choses dans le bon sens, d’autres font dérailler la machine japonaise. Le film fait le choix de l’animation en relief, emboîtant le pas aux studios Ghibli qui, eux aussi, ont troqué le dessin à la main traditionnel pour les images de synthèse dans leur dernier projet – le plus mauvais. Cette tentative de draguer un nouveau public, biberonné à Toy Story et la Reine des Neiges, fait perdre ses détails au monde extravagant de Toriyama, ses aspérités de production à l’ancienne, malgré la résurgence de designs loufoques et de personnages foldingues. Les séquences d’action en pâtissent. Super Hero expérimente, par la même occasion, une mise en scène immersive et fluide, calquée sur les blockbusters américains, et une structure narrative en complète opposition à celle du précédent volet : alors que Broly se divisait en deux morceaux hétérogènes (le bavardage puis la baston), cette itération se plaît à rompre le rythme, à mélanger les gestes les plus épiques aux blagues les plus idiotes, à froisser un peu de sa mythologie (les fameuses boules de cristal éponymes refont surface) pour déboucher sur l’enfilade de transformations habituelle. Une oscillation régulière entre les ressorts ancestraux de la saga et des inventions qui ne lui font pas que du bien. Akira Toriyama tente par ailleurs de colmater les nombreuses incohérences éparpillées depuis la relance de Dragon Ball, dont la temporalité est plus que jamais à revoir. Ses excuses ont de quoi faire grincer des dents les plus passionnés d’entre nous. Alors, si quelques éléments de Dragon Ball Super : Super Hero sont à louer, que le reste se fera oublier, aucun ne rivalise réellement avec son ouverture qui reprend brièvement et esthétiquement le combat du jeune Goku, d’où jaillit un zeste d’émotion mélancolique.