Love, Death & Robots (Saison 3), programme amélioré [Critique]

La troisième saison de Love, Death & Robots, toujours sous la tutelle de David Fincher, rattrape la flemmardise de la précédente pour un résultat grisant.
Amour, mort et robotique sont au centre de courts-métrages anthologiques, déconseillés aux âmes sensibles.
Leur projet de remake du film Métal hurlant n’a jamais vu le jour, mais les comparses David Fincher et Tim Miller ont pu étancher leur soif de robots dépressifs avec le programme Love, Death & Robots. Distribuée par la plateforme Netflix et alimentée par des studios internationaux, la série d’animation incarnait une promesse : l’exploration de la science-fiction dans ses moindres recoins, y compris les plus sordides, et par tous les prismes imaginables. Promesse qui fut, hélas, rompue avec une seconde salve d’épisodes qui envoyait voler sa nature anthologique pour ne faire que photoréalisme et dystopie typée Blade Runner. Un an plus tard, Fincher et Miller refont prendre l’air à leurs monstres futuristes avec une troisième saison certainement moins attendue. D’entrée de jeu, celle-ci se connecte avec la première en offrant une suite aux Trois Robots, un court-métrage humoristique qui raillait l’humanité à travers son extinction et qui réitère le sketch ici. Une tentative compréhensible de vouloir réconforter les déçus à l’aide de faciès métalliques familiers (et appréciés) tout autant qu’elle s’avère paradoxale car brisant inopinément la pluralité des propositions. Outre cette déconvenue qui annonçait la mort de la surprise et de l’inédit, Love, Death & Robots recouvre sa générosité et construit cette vague d’épisodes avec la radicalité, l’effronterie et l’ardeur de ses plus belles heures. Les passages de Jennifer Yuh Nelson, Alberto Mielgo et David Fincher en tant que metteurs en scène ne sont pas étrangers à cette réussite. Le réalisateur de Mank (aussi exclusif à la plateforme) donne un aperçu de ce qu’aurait pu être son adaptation de 20 000 lieux sous les mers, enterré par Disney, en opposant un crustacé visqueux venu des profondeurs et de pauvres matelots à l’âme corrompue, taclant le comportement humain avec le nihilisme qu’on lui prête. Des octopodes avides de sang frais, faits de chair ou de fer, Love, Death & Robots en déborde, les déverse sur les cosmonautes, les soldats américains, les simples passants. La fin du monde, et plus précisément l’éradication de notre espèce, est maintenue au cœur de la machine. À partir de là, le programme varie les plaisirs et s’entête, pour notre plus grand plaisir masochiste, à réinventer la mise à mort.
On lui reprochera ses textures répétées d’un court-métrage au suivant, la récurrence de l’animation relief qui paraît identique sur la majorité des neufs chapitres. Mais ces délires d’alunissage loupé, d’hydres lovecraftiennes, de grizzli cyborg et de rongeurs vétérans – un épisode hybride entre Terminator et Ratatouille, poilant – sont si diversifiés, si extrêmes, que la série échappe poliment à la redite. Et si ses thématiques favorites se comptent sur les doigts d’une main humaine encore intacte, Love, Death & Robots peut aisément se planquer derrière les directions artistiques léchées, tranchées, quelquefois déconcertantes, développées par les studios recrutés. Netflix s’assure ainsi d’objets singuliers tel que Jibaro, revisite du mythe de la sirène qui entrecroise réalisation frénétique et montage sonore incisif, ou La nuit des petits morts, qui parodie le cinéma de George A. Romero au format miniature. Tous ne partagent la même ambition démesurée, la même complexité philosophique, ni le même penchant pour la métaphore gore. D’une odyssée de l’espace psychédélique à la plaisanterie alarmiste mais légère, il n’y a qu’un bouton de télécommande. Reste que, en dépit d’une irrégularité admise et de piques racoleuses, le show rachète la flemmardise d’une deuxième saison produite en quatrième vitesse et qui recyclait déjà ses recettes. Love, Death & Robots justifie ici chacun de ses épisodes par l’emploi d’une esthétique ultra-précise, le déballage d’un pamphlet grinçant, un pastiche taquinant légitimement nos usages technologiques, sans que le niveau ne faiblisse. Dans ces conditions, une quatrième édition ne serait pas de refus.