Love, Death & Robots (Saison 2), obsolescence programmée ? [Critique]

L’effet de surprise passé, la série produite par David Fincher et Tim Miller maintient son délire alarmiste mais s’écarte du format anthologique pour un résultat monotone.
Aventures improbables sur de lointaines planètes ou troubles du quartier, l’anthologie animée revient avec de nouveaux courts-métrages déconseillés aux âmes sensibles.
La première saison de Love, Death & Robots, fruit de l’alliance de David Fincher (Seven) et Tim Miller (Deadpool), fut une aubaine pour la plateforme Netflix qui accueillait alors un répertoire d’histoires farfelues faites de variations sanglantes, violentes et technologiques. Aux dix-huit segments initiaux, dont la qualité et le style oscillaient entre excellence et condensé d’étrangeté, s’ajoute aujourd’hui une seconde plâtré d’épisodes, toujours pilotée par le duo gagnant. Le menu comprend robots défaillants, Noël inhabituel, maraudeur régénérant, argonaute échoué et une bonne dose de nihilisme, dans la lancée du premier volume. Mais si ce dernier pouvait se vanter d’avoir varié les plaisirs, des motifs employés aux techniques d’animation, ces huit nouveaux courts-métrages tendent à l’uniformisation de la série et défont le principe fondamental et affriolant de l’anthologie. Les récits se ressemblent, se fondent les uns dans les autres, et la surprise vivifiante (et déroutante) de 2019 ne fait plus effet. L’on y retrouve bien ses monstres gluants, sa brutalité continue, son portrait acide de l’humain (peu étonnant que Fincher soit producteur), sans qu’aucune de ces formes ne fasse éclore la satisfaction de croquer un univers étranger. Love, Death & Robots perd quelques plumes au jeu du duplicata, laissant ses inspirations cinématographiques s’étirer longuement. Les fantômes de Blade Runner, David Cronenberg, Alien et autres intitulés tout aussi réputés flânent à l’écran, les scénaristes (venus des quatre coins du globe) planqués derrière leurs références. Le train (science-)fictionnel loupe la gare du dépaysement.
Le crayonné se fait discret, relayé par une vague photoréaliste à s’en décoller les paupières. Agglomérat de matières trahissant le réel, prouesse technique impayable – Snow in the desert est, en ce sens, une pépite –, le défi est mené haut la main par les équipes d’animateurs qui officient sur cette deuxième saison. Une halte en stop-motion et un détour par l’animation relief, proche de Spider-Man : New Generation, viennent rompre l’équilibre artistique avec panache, le show ayant nettement signifié sa dévotion au réalisme en abdiquant le reste. À défaut d’adapter le style au texte, ce qui renforçait initialement l’essai, Love, Death & Robots prolonge les sessions de boucherie, les dystopies dignes de Black Mirror asseyant l’être humain face à son propre échec, les écarts humoristiques et les vertiges philosophiques. Sous les explosions burlesques et les fusillades crues, la série animée glisse ses pamphlets et vise à secouer les consciences, non sans fracas métalliques. Un pessimisme fincherien en arrière-plan, le programme pourrait se bonifier en chamboulant légèrement son propos, ici manifestement resserré – indépendamment du nombre réduit d’épisodes. L’allure parfois dévergondée de la première saison entrecoupait les claques assenées, et sa disparition pèse lourdement. La troisième saison, annoncée pour 2022, réhaussera le niveau ou validera le déclin.