S.O.S Fantômes : L’héritage, ectoplasmes à l’ancienne [Critique]

La saga fantastique Ghostbusters se recycle sous la houlette du fils Reitman qui, avant de suivre les traces de son père, crée la magie en injectant de son cinéma.
Une mère endettée, accompagnée de ses deux enfants, s’installe dans la maison de son père dans la petite ville de Summerville. En fouillant la battisse, les enfants découvrent du matériel de chasseurs de fantômes appartenant à leur défunt grand-père.
Ce n’est pas la première fois que la franchise Ghostbusters passe au défibrillateur. En 2016 déjà, Paul Feig tentait de ressusciter les chasseurs de fantômes les plus cocasses du cinéma avec un reboot féminin qui ne fit plaisir à personne. Cinq ans après ce dérapage, Jason Reitman récupère ce qu’il reste des films à succès de son paternel – Ivan Reitman, réalisateur des deux longs-métrages originaux – et déloge l’affaire en rase campagne, à l’opposé des quartiers urbains de New-York. Adieu les brimades de Bill Murray ? Pas tout à fait, car comme le suggère son titre français, cette édition 2021 traite la question de l’héritage et la bande de scientifiques hante le film tels les ectoplasmes qu’ils mettaient en déroute. Comme l’a fait J. J. Abrams avec son Star Wars : Le Réveil de la Force, bien que plus mesuré, Reitman dépoussière les objets cultes et lieux en ruines à l’aide de jeunes gens qui ne connaissent rien aux exploits des héros de leur monde. Des adolescents qui souffrent d’abord de problèmes personnels, entre famille dysfonctionnelle et besoin d’acceptation – des thématiques que le réalisateur de Juno embarque de film en film –, avant de devoir composer avec le passif de leur grand-père, ex-chasseur de spectres que tout le monde pensait fêlé. Sous cet angle, la magie fait effet, le fantôme n’étant plus une farce ambulante mais un boulet à traîner, un marqueur d’absence, un mystère à élucider qui déboucherait sur un accomplissement personnel. Voir le fils Reitman cadrer ainsi la figure paternelle, dont le manque pèse sur l’ensemble des protagonistes et que personne – pas même le sympathique Paul Rudd – ne remplace, a quelque chose de captivant. Comme si rien à ses yeux ne pouvait égaler les travaux de son géniteur.
C’est ce qui finit par crever l’écran, et les vingt dernières minutes enfoncent le clou : dans cette configuration nostalgique, le présent est incessamment rattrapé par le passé et, au vu du final, perd toute valeur lorsqu’ils se font face. Les nouvelles générations ne sont bonnes qu’à déblayer le chemin pour les anciennes, tuant dans l’œuf un ensemble de suites prometteuses malgré de belles portes ouvertes. Avant de basculer irréversiblement lors de sa deuxième partie dans la marmite fumante du fan-service, celui-ci étant jusque-là réduit aux documents d’archive ou gros plans sur les gadgets phares, Ghostbusters : Afterlife flirte avec les productions Amblin. Un soin identique des personnages, l’émerveillement et la candeur d’une chasse au trésor et son zeste d’horreur, un humour infantile, parfois gênant. Il faut néanmoins, pour atteindre ce divertissement qui conviendrait aux héritiers de Spielberg et amateurs de Stranger Things, subir une introduction qui piétine et les étourderies d’un script prisonnier d’une capsule temporelle. Quand ce ne sont pas les reliques du long-métrage de 1984 qui resurgissent, ce sont les costumes et les décors qui ramènent le public (gratuitement) aux diners de l’époque. Lumière stable au sein de cette machine hollywoodienne coincée entre nostalgie et fraîcheur du renouveau, la distribution du quatrième S.O.S Fantômes fait sa qualité. Si Carrie Coon (hilarante) et Paul Rudd, qui joue les hommes-fourmis pour Marvel, n’ont plus rien à prouver et font un parfait couple atypique, les deux se font coiffer au poteau par Mckenna Grace, comédienne aperçue dans la série The Haunting of Hill House. C’est sans difficulté que la jeune actrice capte l’attention et s’impose en héroïne juvénile et marginale, archétype geek par excellence, que l’on aimerait recroiser sous la direction de Jason Reitman, ou non. Reste à savoir si la franchise s’offrira des panoramas neufs ou ressassera les drôleries originelles – ce qu’indique une scène post-générique totalement dispensable.